29 janvier 2021

Bien qu’il ne faille pas tenter le diable, il y a un sujet brûlant qui mérite discussion selon Rob Papworth de MB92 La Ciotat…

Le Feu. . Alors quand l’agence The Superyacht Group m’a demandé d’écrire un article sur l’un de nos nouveaux systèmes de sécurité incendie, ma première réaction a été de refuser. Je ne préfère pas tenter le diable. Les accidents et les assurances sont les sujets les plus sensibles et les plus tabous dans notre secteur actuellement.

La santé et la sécurité prennent de plus en plus de place dans nos préoccupations quotidiennes. Chez MB92 La Ciotat, en trois ans nous avons multiplié par cinq nos investissements HSE à la fois en matériels et en logiciels, en processus, dans un meilleur équipement, une meilleure formation, et, le plus important, un personnel plus qualifié et plus nombreux. Malgré tout, la menace semble étrangement plus grande que jamais, planant sur nous comme un gros nuage noir.

Comme cela arrive souvent, cette prise de conscience accrue est en partie due aux médias qui nous scrutent à la loupe – les moteurs de recherche et les réseaux sociaux font qu’il est presque impossible de passer sous silence un événement grave. Naturellement, suite à un incident, il y a un équilibre fin à trouver entre protéger la réputation du propriétaire ou du chantier naval (et les emplois qu’ils créent) et répondre à demande d’une plus grande transparence pour tenter globalement d’améliorer le regard porté sur notre industrie.

 

 

 

Le Refit – Ce n’est pas qu’une question de qualité, de temps et de prix

Rob Papworth

De toute évidence, les enquêtes sur les incidents graves ont tendance à être difficiles car ce n’est souvent qu’après plusieurs mois, voire des années plus tard, que la cause exacte est connue. Les rapports sont alors généralement gardés secrets par les parties impliquées en dépit des appels à mettre en place des commissions d’enquête de type CAAI. Cependant il est peu probable cette demande avance car les navires auxquels nous faisons référence transportent peu de passagers.

Le problème avec cette opacité, c’est qu’en cas d’incident, les chantiers navals tiers ne seront pas informés de cet incident, et encore moins de sa cause. Cela signifie que dans ce domaine où l’approximation n’est pas tolérable, chaque yacht ou chantier naval doit mener ses propres vérifications, formations et enquêtes de sécurité. Ajoutez à cela l’attention accrue portée sur les questions d’environnement, vous comprendrez pourquoi la santé et la sécurité sont devenues une préoccupation grandissante pour de nombreux chantiers navals. L’impact des accidents comme celui des pollutions provenant des systèmes d’extinction d’incendie sont désormais au cœur de la prévention. Prévenir ou guérir, il faut trouver le juste équilibre. La préparation à tous les scénarios est donc toujours nécessaire.

Cette approche globale prônée par MB92 La Ciotat nous a conduit à installer le plus grand système d’extinction d’incendie automatique par mousse à haut foisonnement de France, sur une zone où il n’y a même pas de superyachts ! Avec 3 280 m2 de surface à couvrir, le système automatisé doit pouvoir éteindre un incendie en moins de cinq minutes sans endommager le bâtiment, son contenu ou ses abords. La solution apportée est une mousse à forte expansion qui remplit le bâtiment jusqu’à huit mètres de hauteur avec de la mousse carbonique qui étouffe instantanément tout type de feu. Le volume de mousse nécessaire est de 26 000 m3, ce qui équivaut à complètement remplir deux des plus grands superyachts du monde ! Heureusement, la mousse se dissipe au bout de quelques heures seulement et après un rinçage rapide, la vie peut reprendre son cours normal.

Parallèlement à ce type d’investissements massifs, nous mettons en place des solutions techniques mobiles de pointe comprenant des systèmes d’alerte précoce et de coordination, afin de réduire le temps de réaction et d’émettre des instructions claires et concises grâce à la géolocalisation, ce qui est extrêmement important sur un site aussi vaste que celui de La Ciotat. Les autorisations individuelles via mobile du département HSE sont désormais obligatoires, afin de tracer les produits inflammables ou les actions à haut-risque. Nous espérons ainsi fournir un rappel utile à chaque personne intervenant à bord, ainsi que des informations-clés sur les travaux et les produits en cas d’incident. Parmi les autres outils développés se trouve la mise en place de panneaux multi-langues de signalisation et d’alerte.

Le secteur de l’assurance est de plus en plus pointilleux et des discussions sont déjà en cours entre l’ICOMIA – Superyacht Refit Group et les acteurs majeurs de l’assurance, afin de mieux formaliser le processus et d’augmenter la fréquence d’inspection des chantiers navals, l’actuel formulaire JH143 utilisé pour les projets individuels étant relativement onéreux pour les deux parties, particulièrement pour les sites effectuant plus de 50 chantiers par an. Beaucoup d’éléments rendent l’analyse très compliquée car il faut une étude détaillée des procédures, de la structure, de la formation, des exercices de sécurité et des informations de base tels que l’emplacement des bouches d’incendie, et des postes incendie, ainsi que l’analyse de la position des navires, qui peut varier au sein du site. Si MB92 Group a engagé un audit effectué par un organisme extérieur de premier plan, la préférence des assureurs va à un système qui s’applique à l’ensemble du secteur et qui harmonise l’analyse des risques. Cela permettrait d’ajuster ou d’éviter la surprime d’assurance d’un navire lorsque celui-ci entre dans un chantier naval pour des travaux importants.

Ce sujet est une préoccupation pour l’ensemble du secteur, et à terme, tout le monde sera concerné. Nous avons tous le devoir de soutenir cette volonté d’amélioration. Attendre qu’un incident se produise pour agir est l’assurance de voir nos cauchemars devenir réalité.